Entrez cher spectateur dans le cabaret qui va vous faire découvrir le monde étrange tout en mots de Valére Novarina. Vous allez y rencontrer des personnes tout en couleurs clamant folie et fougue. Le théâtre de l’utopie, comme le présente l’auteur, va prendre tout son sens dans un Espace furieux.

Valère Novarina est un auteur contemporain qui est un amoureux du théâtre, des mots et de leurs sens. Il écrit avec passion ces histoires, qu’il met parfois en scène. La jeune metteure en scène, Mathilde Delahaye, qui est tombé sous le charme du vocable de ce dernier a décidé de lancer un défi. Et si elle mettait en scène « L’espace furieux » ? Voilà qui est dit et l’aventure est partie.

Pourquoi est-ce une véritable aventure ? Pour une raison très simple. Les textes de Valére Novarina n’ont pas l’obligation de compréhension. Il veut d’une certaine façon se libérer de la contrainte de raconter une histoire avec un début et une fin et avec une construction cohérente. Pourquoi devoir se limiter à cela quand le pouvoir de l’imagination peut créer des récits étranges et singuliers ? Alors comme le texte n’est pas un renfort à l’histoire, il faut alors avoir une mise en scène étonnante avec des comédiens qui ont de l’énergie et du talent à revendre.

Pour de la surprise, on va en avoir dès les premières minutes du spectacle. Un musicien, Kaspar Tainturier-Fink, avec consoles et contrebasse, en haut de son mini-chapiteau compose sa musique en direct. Deux jeunes, vestes de Monsieur Loyal, accueillent les regardants et commencent à leur tenir un langage qui surprend et égare par moment. Il est plein d’imprévu surtout lorsque se met en place un jeu sur le rythme, les toponymies, les homonymies, les sonorités… Les interprétations deviennent multiples et chacun peut alors s’approprier une compréhension.

Les comédiens eux-mêmes ont du faire fi du sens. Ce qui ne les a pas empêché de mettre de la finesse et de l’intelligence dans leur parole. Un grand coup de chapeau à Pierre-Félix Gravière qui dans sa nonchalance a su faire vibrer le texte particulièrement bien. Tout comme à Juliette Plumecocq-Mech qui a un charisme incroyable a su s’imposer sur la scène dans sa folie douce. Mais le talent de l’ensemble des artistes sur scène, Frédéric Leidgens, Roman Pageard, Maud Pougeoise et Blanche Ripoche, n’aurait pas été aussi étonnant sans la curieuse mise en scène de Mathilde Delahaye. Elle s’est faîtes aidé de la dramaturge Viviane Point pour mieux s’approprier le texte et des sources d’inspiration pour la mise en scène. Elle introduit le spectacle dans un cabaret, puis le rideau tombe et un autre monde s’ouvre, vers des espaces sans limite. La dynamique est de mise. Car même si parfois le sens s’échappe, on reste captivé par ce qui se passe. La mise en vie des mots leur donne une beauté fugace délicieuse d’étonnements.

On tend les oreilles et on ouvre grand les yeux pendant tout le spectacle. On ne veut rien rater. On n’accepte de ne pas tout comprendre. A la fin ne peut qu’applaudir face à cette expérience de théâtre qui va rester dans la mémoire. Indéniablement, Mathilde Delahaye sait relever les défis les plus audacieux.


Extrait
Le Vieillard Carnatif : J’étais cloué de Stop : ma vie se passait à cloudre. À installer des stops, sur des passages de routes, pour que nos piétons traversassent… Activité qui allait bon train… Puis le temps m’est apparu et m’a fui… Puis je me suis aperçu que c’était moi qui étais ici : je ne clouais que des stops, stop sur stop, livrant passage à des camions automobiles livrant camions poubelles, tout ceci, le matin tôt, à Rungy,

à Huit, à Action-les-Plâtres. Elles bondiraient à moteur rugissant, si fort que je les entendrais si elles étaient encore là !.. puis elles s’arrêteraient soudain de cesser de bondir… C’est alors qu’on m’a demandé de déremplacer un feu rouge par un vert, en m’habillant moi-même de ce costume orange-marron. Mais le feu vert verdit et toutes les autos partuiiirent, et il n’y avait plus de sécurité ! Et il n’y avait donc plus personne

à traverser ici-bas. Alors la suite m’écrasa. Et je mourus cada, tout le long du jour épatant.

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