Aff_PrixT13_petiteC’est dans le cadre du Prix Théâtre 13 du jeune metteur en scène, que nous est proposé Merlin ou la terre dévastée de Tankred Dorst, mis en scène par Marc Delva. Immersion directe dans l’univers onirique trash, version numérique en pseudo costume dans le monde de Merlin. Un voyage dont vous ne pourrez en sortir totalement indemne.

Merlin l’enchanteur, évoque forcément des références que cela soit celle des chevaliers de la Table ronde ou/et le dessin animé de Disney. Très peu de gens font le lien avec l’œuvre de l’allemand Tankred Dorst, créée en 1981 au Schauspielhausde Düsseldorf, qui décrit la vie du point de vue de ceux nés après-guerre, « une histoire de notre temps : l’échec des utopies ». Ici, pas de petits oiseaux qui chantent l’amour et l’amitié et encore moins un Merlin en toge bleu, gentil, tendre et souriant.

Grétel Delattre
Grétel Delattre

Le spectacle commence avec deux clowns arrivant de chaque côté du public qui se cherche et se retrouve sur la scène. La femme est assez ronde et va devoir très bientôt accouchée. Les contractions commencent, elle pousse. Noir sur scène. Assis au bord d’un bureau, un homme lit un journal. C’est Merlin(Christophe Garcia),l’enfant d’une mortelle et du Diable (Grétel Delattre), grand, beau et musclé, déjà adulte. Son père, qui est une femme, va l’aider à trouver sa voie, celle d’un enchanteur, d’un devin qui va créer les chevaliers de la table ronde et la légende du roi Arthur (Benjamin Guillet). 

Benjamin Guillet
Benjamin Guillet

Le diable va prendre aussi l’apparence de la narratrice, au charme à la Françoise Hardy qui va raconter l’histoire assise sur une chaise très haute, comme l’arbitre de tennis. Avec sa voie rauque, elle fait le lien dans le temps et l’espace. Merlin devient plus une voie et une image projeter au milieu du sol. Il est à la fois un guide, un testeur, un créateur, un artiste… Cette légende orale de plus de 1 000 ans, se colportait de village en village pour que les gens puissent s’identifier aux héros, aux braves en leur enseignant le sens de certains valeurs comme le courage ou la foi en Dieu. Tankred Dorst a repris cela et a apporté une notion plus moderne. 

James Borniche
James Borniche

Les thèmes fondateurs de notre civilisation sont abordées comme la figure du bien et du mal (qui en général font partis d’un tout), le héros, la trahison, l’utopie, l’immortalité, la foi, la transmission, le pouvoir, la loi, la tentation, le paradis perdu, la culpabilité, la sexualité, la pureté, la nature… La réalité s’éprouve, se ressent dans la douleur et la souffrance. Ainsi sur scène, Marc Delva, le metteur en scène a fait le choix de réunir des chevaliers : Sir Gauvain, Sir Orilus (James Borniche)Sir Kaï, l’écuyer de Sir Yder (Florent Hu), Perceval (Thomas Brazete), Sir Lancelot, Sir Beauface (Édouard Penaud), Mordret (Flavien Bellec), Sir Aggravain, Sir Yder (Hugo Bardin) et Sir Lamorak (Emmanuel Rehbinder). Ils combattent le mal, essaient de propager en même temps la foi catholique, quitte à couper des têtes. Bref, des héros comme on peut en retrouver dans les romans médiévaux. Mais avec plus d’interrogations, de rébellions comme les jeunes qui se plaignent de l’immobilité des vieux. Bon, pour la peine, Merlin va les punir, et vont réfléchir à l’avenir avant de se plaindre. 

Sophie Mousel
Sophie Mousel

Les femmes ne sont pas pour autant oublier. Car comment parler de légendes arthuriennes sans les femmes. Bien entendu, on va rencontre Guenièvre (Sophie Mousel) qui aime Lancelot. Elle va parler de son amour impossible par correspondance à Yseult (Elodie Galmiche). Elle s’y connaît en amour impossible avec Tristan. Et puis, il y a Hélène (Manon Rey) qui a séduit Lancelot pour lui faire un enfant. Elles font tourner la tête des hommes qui en perdent parfois la raison. Et puis aussi, on croise Mark Twain (Florian Boolay) qui voyage dans le temps qui essaie de donner des conseils qui ne sont pas trop bien pris. 

Marc Delva
Marc Delva

Une histoire un peu rocambolesque très bien mis en scène par Marc Delva. Il a pris le parti de la modernité tout en restant dans la simplicité. J’ai adoré les costumes avec les armures qui sont des tenus de football américain, les robes des femmes qui ne sont que de simples tissus très justement coupés… Les projections sur le sol délimitent l’espace et structure les actes. Au début juste carrelage, il donne le nom du chapitre qui arrive, les lettres jaunes s’affichent sur le sol avec un bruit de fond de machine à écrire. Dommage que le texte soit en bas de l’espace de scène délimité, car les gens en haut de la salle ne pouvait voir ce qui était écrit. Mais l’idée est bonne. En plus, cela indique que l’on suit une enquête policière. Les comédiens restent sur scène et bougent avec leurs sièges selon les nécessités. Ils se changent sur scène. Plus de frontière entre ce qui se montre et ce qui se cache. Tout se mélange, s’affronte et se rencontre. 

Une belle façon d’imaginer un conte contemporain avec énergie et folie avec une troupe qui se donne à 200% pour emmener le spectateur dans un ailleurs. Quand le mythe rencontre l’humanité, c’est fracassant de souffrance et de réalité. 

« Je pense que le théâtre est l’une des plus grandes inventions de l’humanité, au même titre que la roue, ou que l’usage du feu. Tant qu’il y aura des hommes, ils se joueront quelque chose et, en se jouant quelque chose, ils diront : Je suis ainsi. Tu es ainsi. Je suis ainsi… Les lois de la dramaturgie et les modes de jeu changent, l’image du monde change. Mais sur la scène du théâtre, la question de la situation de l’homme est toujours de nouveau posée. Et c’est ainsi que je vois le théâtre comme institution faite non pas pour édifier mais pour sauver les êtres humains… » Tankred Dorst

Lien vers le Théâtre 13

Cela m’a fait pensé au magnifique spectacle vu également au Théâtre 13, Lancelot, le chevalier de Merlin (mon avis)

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