Les puristes d’Eugène Labiche vont être déroutés et à un plus d’un titre. Prendre un classique du 19e et y mettre de l’électro, des peluches et des bons un peu partout, c’est audacieux. La compagnie l’Eternel été ne manque de folie créative.
Au moins le parti du loufoque est assumé dès le début. Lorsqu’on rentre dans la salle, on prend un moment pour admirer la scène. On observe des tas de coussins un peu partout ainsi que des matelas, des poufs, des draps. La Comédie Française n’aurait jamais osé ça. Mais n’est pas une belle façon de prouver que Labiche est intemporel? On nous l’annonce : « Quelle aventure ». Et bien entendu, nous n’aurons guère le temps de nous ennuyer. Comment pourrions en douter lorsqu’on voit un homme habillé en grenouillère avec une peluche? Heureusement, la compagnie l’Eternel été garde le texte original, du moins par moment.
« Dans 1h00, je serai marié ». L’impatience touche le futur marié. La belle-mère est insupportable. Le cousin détestable. Son cheval a mangé le chapeau de paille d’Italie d’une femme trompant son mari. Il faut qu’il trouve le même chapeau pour que la dame quitte sa noce. A partir de là, on assiste à une succession de rebondissements plus improbables et absurdes les uns que les autres. L’ennui? Impossible ici. D’autant plus, qu’ils jouent avec les codes de la comédie de l’époque avec les mimiques exagérées, les portes qui claquent sauf qu’elles sont des matelas mis debout, des courses poursuites sous formes de sauts à droite, à gauche.. Le rythme est dense, rapide et mesuré dans une forme de cohérence.
Tout est pris avec dérision pour amuser sans cesse et sans lasser. Les costumes sont des plus étonnants et c’est un régal de prendre le temps de les admirer. On voit même des lapins rose bonbons sur des souliers. Rien n’est laissé de côté et on voit le travail que cela a du demander. Plus c’est déjanté et plus cela demande de la précision pour que l’effet fonctionne auprès du public. Les prises se risques sont certes mesurés et toujours dans l’audace. La preuve avec une bataille de peluches entre les comédiens et les spectateurs. Quelle folie! Guillaume Collignon, Victor Duez, Sarah Fuentes, Mélanie Le Duc et Emmanuel Besnault osent avec talent et c’est terriblement courageux. Sans oublier que c’est payant car c’est bien la preuve que les classiques restent toujours contemporains et que c’est presque accessible à tout le monde. La pièce se présente comme un vaudeville électro-onirique, donc on peut dire que tout à chacun est prévenue. Une fois en salle, vous comprendrez vraiment ce que cela signifie.
Une extravagante adaptation d’un classique qui prouve qu’il est toujours possible de déplacer les limites. Le pouvoir de l’imagination permet d’oser et d’emporter les spectateurs dans l’excentricité amusante qui redonne du baume au coeur. Donc juste Bravo et Merci.
Où voir le spectacle?
Au Lucernaire jusqu’au 17 mars 2024