Dans le cadre du Festival Temps d’Images, le 104 propose un spectacle assez surprenant : Julia, adaptation de Mademoiselle Julie d’August Strindberg.
La réalisatrice et metteure en scène brésilienne Christiane Jatahy propose un spectacle où la vidéo rencontre le théâtre. Les écrans apportent un réel plus à l’histoire et à son appropriation. Il ne faut pas avoir d’a priori sur les nouvelles formes du théâtre. Il faut y aller ouvert à tout et se laisser surprendre.
Nous sommes à Rio, au Brésil. Le spectacle débute sur des images d’une petite fille qui se fait filmer par son père et qui à un moment ordonne à ces serviteurs de quitter la pelouse car il filme. Les personnes sont plantées ainsi que le contexte. Les années passent et un soir Julia (Julia Bernat) fait du charme à un serviteur (Rodrigo dos Santos) qu’elle connaît depuis toujours. Ils s’aiment comme ils se détestent. Sur toile de fond se joue la différence de classes et de couleurs dans un Brésil contemporain. Peuvent-ils vraiment s’aimer? S’aiment-ils? Julia, est une femme entière et caractérielle. Elle flirte sans cesse entre la folie, la tendresse et la haine. Une prouesse formidable de Julia Bernat qui incarne cette femme avec une authenticité saisissante.
Les comédiens sont dans l’histoire. Ils ne jouent pas, ils la vivent aussi bien dans l’amour, dans la haine, la colère ou la souffrance. A aucun moment, on ne doute de la sincérité de ces derniers. Ils se donnent corps et âme. D’ailleurs, on oublie presque que se sont des comédiens. Presque, car l’histoire ne se déroule pas simplement sur la scène. L’espace de la salle 400 du 104, est très grande et permet d’accueillir un système d’écran, de projections et des décors importants. Le spectacle mélange des scènes enregistrées, des scènes tournées en direct et le jeux des comédiens sur scène. Le caméraman est présent presque tous le temps, il est à l’intérieur du spectacle et devient spectateur à la fois. Parfois, il s’assied et regarde ce qu’il se passe. D’autre, il demande de refaire un geste pour le filmer. Parfois, nous savons ce qui se passe derrière un décor, nous ne pouvons voir ce qu’il se passe que par la projection sur les écrans. Nous devons spectateur voyeur.
Le processus de séduction est subtilement amené. J’assiste à ces scènes qui ne peuvent me laisser indemne. Le spectacle doucement dépasse le texte de base. Les personnages deviennent pas moment les acteurs, qui nous parlent, qui nous adresse des regards complices, qui nous font part de leurs états d’âme. Les frontières s’amenuisent. Où est la réalité? Où est la fiction? Est-ce important? Assis, les yeux ouverts, le temps passe et le regard ne peut quitter ce spectacle surprenant. Les scènes d’amour tout comme les scènes de violence nous emportent dans un tourment où la fin sera de toute façon fatal.
Ici la folie rime avec le génie. Dépassez les frontières des idées préconçues et ouvrez les yeux vers un spectacle qui va vous saisir et marquer votre esprit.