Quand l’injustice devient flagrante, c’est aux élites populaires de prendre la parole. Emile Zola a décidé de monter au créneau pour défendre Dreyfus. Un choix qu’il a fait en toute conscience, qu’importe les conséquences.

Comment ne pas être intrigué par le titre « Zola l’infréquentable »? Puis on voit le nom de Didier Caron à la plume et à la mise en scène. Alors nous savons que nous pouvons aller voir le spectacle les yeux fermés. Mais attention, nos émotions vont être bouleversées. L’auteur maîtrise grandement le sens des mots et l’impact de ces derniers. Aucun sujet ne l’effraie surtout quand il est question d’injustice, de haine et de discrimination. Il a choisi une approche très judicieuse de l’affaire Dreyfus par le biais d’un auteur célèbre, Emile Zola. L’homme est aimé du peuple grâce à ces ouvrages où il parle d’eux sans demi-mesure. Le 5 janvier 1895, il vient dîner comme d’habitude chez son ami Alphonse Daudet, gravement malade. A partir de là, sa prise de conscience, sa révolte vont prendre un nouvel élan suite à des échanges des plus houleux avec Léon Daudet, le fils. Pamphlétaire et journaliste nationaliste, il s’enchante de la condamnation et de la dégradation militaire du capitaine Dreyfus. D’ailleurs, dans ces écrits surtout dans « Le Figaro » sa verve ignominieuse trouve son public. Zola refuse de rester à ne rien faire. Les échanges verbaux entre les deux hommes vont faire échos à bien des tribunes papiers. Comment admettre une culpabilité du fait juste de sa religion?

Didier Caron fait appel à son talent de conteur pour raconter la véritable confrontation entre Emile Zola et Léon Daudet et réaliser un portrait tempéré de l’homme connu. Les mots font mouche, à la fin de l’envoie, ils touchent. Le duo Pierre Azéma et Bruno Paviot se les approprie. Ainsi ils deviennent ces êtres pleins de conviction, de colère et de bouleversements. Ils nous plongent en cette fin du XIXe siècle, si agitée politiquement avec ces pensées antisémites, tolérées en société. On prend une claque morale et éthique. Pourtant c’est très réaliste. On pourrait espérer que cela se rattache à une autre époque. Toutefois la réalité dernièrement nous prouve que l’on apprend jamais de l’Histoire. Les 1h25 file rapidement et les nœuds à l’estomac persistent. Les comédiens effacent les zones de la fiction grâce à leur prestation hors norme et si convaincante. Suivre ces convictions demandent de faire des sacrifices et parfois cela mène à la mort. La salle comble ne peut que se lever pour applaudir encore et encore une telle prestation qui nous trouble profondément.

Quel spectacle puissant et bouleversant qui secoue chaque spectateur. Quand l’Histoire prend vie, les émotions sont au rendez-vous au même titre que l’injustice.

Où voir le spectacle? 
Au Théâtre de la Contrescarpe jusqu’au 5 mai 2023

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