Il n’est nul besoin d’être un Montaigu ou un Capulet pour savoir qu’aimer n’est jamais facile. Romy en brisant un interdit ne pouvait prédire un coup de foudre. L’espoir donne des ailes quitte à être déçu par la suite.

La Cordonnerie a trouvé son mode d’expression avec le ciné-concert. N’y voyez pas un vieux film muet en noir et blanc avec un homme derrière un piano. Métilde Weyergans et Samuel Hercule, eux, voient les choses en très grand et misent pour une immersion totale. Comme à leur habitude, ils s’approprient une histoire. Après « Hansel et Gretel », « Hamlet », « Don Quichotte » voilà qu’ils choisissent « Roméo et Juliette ». Pas d’inquiétude, vous n’allez pas avoir le droit à des échanges du dramaturge du 17e siècle avec une mise en scène contemporaine. Les artistes s’approprient l’essence de ce récit avec un amour interdit entre deux êtres. N’est-ce pas un évènement récurrent et universel? Romy qui vit dans le monde des invisibles décident un jour de traverser un pont, la limite, pour aller dans le monde des visibles. Là, il va se passer quelque chose d’improbable et d’imprévisible. Elle tombe amoureuse de Pierre. Un homme rêveur et timide qui écrit chaque jour l’horoscope shakespearien pour la radio. L’attirance est réciproque. Ils n’ont pas le temps de savourer ce plaisir d’être deux qu’il faut qu’il se quitte. La société prohibe tout rapprochement. Qui peut lutter contre les souvenirs et les sentiments ressentis?

« Ne pas finir comme Roméo et Juliette » de Métilde Weyergans et Samuel Hercule © Pierre Corbaz
© Pierre Corbaz

Mais vous vous demandez comment raconter tout cela en ciné-concert? En fond de plateau, légèrement surélevé, sur un grand écran est projeté l’aventure des amoureux. A droite et à gauche de l’écran, deux hommes devant une pléthore d’instruments musicaux et de bruitages, Thimothée Jolly et Mathieu Ogier. Et au coeur, de la scène, Métilde Weyergans et Samuel Hercule devant une table de tennis de table. Ils font les voix dans différents micros, les bruits de pas, de raquettes, de balles, de pots de fleurs qui cassent, de courses, de fuites, de douche… On s’amuse de l’ingéniosité des objets utilisés comme cette poubelle de ville avec une baguette qui restitue le bruit d’un feu d’artifice. Ou encore du versement d’un paquet de coquillettes dans un parapluie qui évoquent les gouttes qui tombent. La magie opère assez vite. On est autant touchée par le film que tous les outils de l’interprétation que la virtuosité des manipulateurs. Devant nous s’affiche l’invisible au-devant de la scène. Nous sommes dans une confidence où le secret se dévoile devant nous. Tout se fait devant nous au risque d’échouer, de se tromper et on se prend au jeu. Impossible de ne pas être touché par cette douce mélancolie amoureuse pleine de rébellion et de remise en cause.

Un spectacle audacieux qui ose tout pour faire réfléchir le spectateur au monde dans lequel il vit.

Où voir le spectacle? 
Au Monfort jusqu’au 28 janvier 2023

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