Dans toutes les sociétés, on trouve des parias, des êtres déconsidérés, oubliés, mis à l’écart… Parfois certaines personnes leurs insufflent de l’humanité pour les mettre en avant. C’est le cas de Victor Hugo qui leur donna la parole dans ces oeuvres. Que diriez-vous d’en rencontrer quelques uns?
Quand on arrive dans la salle, on se retrouve face à un plateau aménagé de façon assez énigmatique. Sommes-nous face à un temple mystique? Allons-nous assister à des incantations? Des portraits de Victor Hugo modifiés nous font face. Une partie de son visage est recouvert par un ensemble de dragons/démons se tenant côte à côte, le regard plein de fureur tout comme l’oeil visible de l’auteur où brille une flamme. A cela, s’accompagne trois têtes au visage neutre disposées sur des draps rouges recouvrant le mobilier. Le mystère s’épaissit au moment où Pierrette Dupoyet entre sur scène avec des guenilles. Va t’on participer à un rite fantasque et fantastique d’où nous serons les témoins?
Rien de cela. Une ambiance sombre pour donner la voix aux sans noms qui ont tant inspiré la littérature de Victor Hugo. La comédienne a choisi d’incarner quatre personnages forts : Fantine, Jean Valjean, Claude Gueux et L’Homme-qui-rit. Un tissus sur les épaules et un masque, cela suffit pour être un autre et nous emporter dans les histoires de chacun. La misère, la souffrance, le désespoir habitent chaque paria qui n’a plus la force de rêver. Des êtres oubliés et que l’on préfère ignorer mais cette misère si bien décrite au 19ème siècle trouve toujours un écho dans notre société moderne. La ville a changé de visage cependant ces reclus sont là. Les mots de Victor Hugo deviennent presque intemporels. D’autant plus lorsqu’elle lit un extrait de l’édifiant discours » Contre la Misère » que l’auteur a prononcé à l’Assemblée en 1849.
Pierrette Dupoyet met toute son énergie et son émotion au service des personnages. Elle dépose de la bonté en chacun d’eux afin de réaliser une incantation à l’humanisme pour chacun des spectateurs. Une émotion vive qui devient plus vibrante grâce à la présence de la musique. Le rythme assez lent emporte et on prête l’oreille aux compositions de Craig Armstrong, Giuseppe Verdi, Hunser Hercher, Antonio Vivaldi, Henry Torgue, Serguei Prokoviev, Francis Poulenc, Edvard Grieg et René Aubry. Les bons sentiments s’exacerbent par la prestation convaincante de la comédienne et nous pousse à réfléchir. Un tel spectacle ne nous permet pas de sortir indemne. On ne s’étonne pas que des ministères soutiennent l’auteure, comédienne et metteure en scène dans ses projets afin qu’elle puisse jouer aussi bien dans des prisons que dans d’autres pays francophones.
Et si demain on pouvait avoir plus d’égalité sociale, les plus démunis pourrait redevenir des êtres humains à part entière. Paria un jour, ne veut pas dire paria toujours. L’espoir est permis.
Où voir le spectacle?
Théâtre de la Contrescarpe
5 rue Blainville
75005 Paris
Jusqu’au 26 mars 2019