Le monde est-il forcément rempli d’hypocrisie et d’injustice ? Alceste tente d’être toujours honnête avec ceux qui l’entourent. Mais personne ne souhaite entendre la vérité alors il faut faire un choix : cohabiter avec le mensonge ou se retirer du monde.
« Le Misantrope » de Molière est une pièce qui inspire de nombreux metteur(e)s en scène. Clément Hervieu-Léger décide de placer l’histoire au cœur d’un grand hôtel particulier luxueux pour la Comédie Française. Morgan Perez, pour la première création au 13ème art propose deux espaces délimités par des panneaux avec des tissus transparents blancs. La compagnie Etincelle va proposer une création plus moderne, ancré dans notre société actuelle. Alceste et Célimène s’aimeront-ils alors différemment ?
Molière met dans son personnage d’Alceste qu’il interprétera, toute sa colère et son dépit suite à la trahison de son ami, Racine et des infidélités de sa très jeune épouse, Armande. C’est la déception du genre humain qui sera au cœur de la mise en scène de Caroline Rainette via Alceste et son procès. Il montre avec sensibilité et rage son combat contre le mensonge, la manipulation et l’hypocrisie générale. Pour lutter avec ferveur et honnêteté, il se présente au tribunal pour défendre son cas. Il a le droit de ne pas aimer un sonnet et le dire sincèrement. « J’ai pour moi la justice, et je perds mon procès ! » Ces sentiments vont être mis à rudes épreuves. Il ne pourra faire le choix entre amitié, amour et ses idéaux face à la pression sociale, à la justice et à la fidélité. Le visuel de l’affiche avec une balance, une épée, un cœur et deux mains, l’illustre à merveille ces dualités. Ainsi la radicalité du personnage est poussée vers des chemins les plus extrêmes. Il se sent prêt à renoncer à toute forme de mondanité.
La modernité de la mise en scène se voit à travers de nombreux aspects. Déjà, la simplicité des décors avec juste quelques chaises, des tables basses et une machine à café. Comme nous à notre époque, les costumes sont ceux que l’on pourrait voir chaque jour en rajoutant la robe d’avocat. L’unité de temps et de lieu ne sont pas respectées afin de donner plus de volume au récit. Ainsi on passe de la salle d’attente du tribunal, au tribunal en passant par la boîte de nuit. Le Misanthrope n’est pas un vieux brigand aux cheveux blancs. Il fait partie de ces jeunes qui ne veulent pas ressembler à leurs parents. Est-ce pour cela qu’il est attiré par une jeune femme coquette, populaire et narcissique ? On voit une Célimène, jeune, libre et indépendante, toujours portable à la main. Tout ce qu’elle est se trouve contraire à ces principes. Serait-elle prête à renoncer à tout pour l’amour, la sécurité, l’enfermement et la sincérité d’Alceste ? La réponse est sans appel : non.
Les comédiens : Bruno Aumand (Philinthe), Camille Cieutat (Eliante & Arsinoé), Lennie Coindeaux (Alceste), Jérémie Hamon (Oronte), Caroline Rainette (Célimène) donnent leur passion, leur fougue et leur énergie pour donner vie à cette critique de société. Encore une création brillante, réalisée avec brio par la compagnie Etincelle.
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