Il y a des sujets tabous dont parfois le théâtre s’approprie. Antony Puiraveaud décide de raconter « L’histoire vraie du garçon qui ne voulait pas être une victime ». Mettre des mots sur le traumatisme permet d’avancer plus sereinement dans la vie et de dénoncer l’inacceptable.

L’auteur n’a pas choisi innocemment le titre de sa création « Le Complexe de Dieu ». Une désignation qui annonce une problématique lourde qui amène le spectateur au cœur des abus sexuels au sein de l’Eglise. Il n’y a pas si longtemps un rapport est tombé et les constats sont déplorables. L’organisation a fermé les yeux sur les actes immoraux de ses représentants laissant de côté tous ces enfants, tous ces individus à jamais marqué. Qu’elle est la valeur de leur parole? Bien souvent, on l’a fait taire avec son lot de culpabilisation. Jouant de leur autorité ces hommes représentants un ordre religieux ont joué de leur autorité, de leur légitimé, de la pression sociale pour se permettre des actes de viols, de manipulation, de cruauté… Au lieu de mettre de mots pour sauver et préserver, bien souvent on préfère laisser les maux prendre racine en fermant les yeux. Quand on ne veut pas voir les problèmes, ils n’existent pas. Rien de tel que le spectacle vivant pour mettre avant ce tabou et sensibiliser tout à chacun. Toutefois, cette prise de décision va effrayer certains qui préfèrent ne pas voir pour avancer plus paisiblement.

Jean-Luc Voyeux dans une mise en scène simple et efficace nous confronte au témoignage d’un jeune homme face à son destin. Matthias, issu d’un adultère de sa mère avec le père François et abusé pendant 2 ans par le père Damien ne peut pas avoir une vie tranquille. « Se faire culbuter par un curé c’est héréditaire ». Il repousse sans cesse des limites jusqu’à ce qu’ils disent ce qu’il a vécu allant même porter plainte. La construction du texte mêle présent/passé, jouant avec les circonstances comme la répétition de la scène où Tartuffe tente devioler de la belle Elmire. « Ah! pour être dévot, je n’en suis pas moins homme« . Un parallèle judicieusement qui montre que cette question de l’intégrité des curés n’est pas récente. Le texte appuie vraiment sur le jeu psychologique qui se met en place entre flatterie et perversion : « tu pourras progresser avec moi », « dis donc tu sens bon », « il faut entretien le plaisir », « profite de moi »… Des paroles du prêtes pleines de double sens qui ont de quoi troubler et donner envie de vomir. Comment ne créer ainsi une culpabilité chez la personne abusée? 

Cette ingéniosité de présentation est poussé également dans le travail de lumière de Florian Guerbe comme dans la scène du tribunal où chaque comédien se met dans la lueur pour témoigner. Un jeu subtile qui permet de nous plonger au mieux du psychisme du personnage centrale. Ce dernier est tenu par Olivier Troyon qui joue en alternance avec Théo Dusoulié. Ils y mettent passion et fougue pour tenir le spectateur qui ne peut qu’être touché de tant de cruauté et de malhonnêteté. « Tu subis un tsunami d’émotions ». Lucille Bobet ou Léonie Duédal, Anne-Cécile Crapie ou Béatrice Vincent, Jean-Marc Coudert ou Jean-Luc Voyeux chacun joue leur rôle pour mieux nous immerger dans ce récit qui pousse autant à la colère qu’à la tristesse. Comment tolérer la pression sexuel d’un religieux censé incarné une droiture qui ne devrait jamais être remise en cause. Encore une fois cela illustre que l’on préfère culpabilisé la victime et non le bourreau. On dénonce celui qui ose dire. Car ce qui n’est pas montré au grand jour n’existe pas. Faire un chèque en toute discrétion n’est pas résoudre un problème endémique et éthique. Cette claque pleine d’espoir rappelle le film « Spotlight », inspiré d’un fait réel, où des journalistes veulent dénoncer les abus dans l’église qui a subi beaucoup de pression pour garder l’omerta.

Un spectacle qui devrait être obligatoire pour les séminaristes pour apprendre à la garder dans le pantalon ou quitter les ordres. Les victimes ne devraient pas être le symbole de la défaillance d’un système qu’on laisse perdurer volontairement. Violer n’est pas un droit qui rester impuni d’autant plus si cela se fait au nom d’une autorité religieuse.

Jusqu’au 25 février 2022

Funambule Théâtre
53 rue des Saules
75018 Paris

metro ligne 12 Lamarck Caulaincourt

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