Installons-nous dans la machine à remonter le temps pour aller dans les années 30 à la rencontre d’Alan Turing. Un homme passionné par les chiffres qui va changer l’avenir de la planète. Pourtant sa fin de vie sera des plus tristes.
Alan Turing développe une passion pour les calculs mathématiques. Son cerveau va très vite et arrive à engendrer des réflexions assez étonnantes comme l’ordinateur intelligent. D’ailleurs son génie va attirer l’attention du gouvernement anglais. Il essaie depuis un moment de décrypter la machine Enigma que les allemands utilisent pour communiquer. Mais aucun chercheur n’arrive à un résultat concluant. On va demander à Alan Turing d’intégrer l’équipe pour pouvoir percer le secret de son fonctionnement. Grâce à sa folie créative, il va élaborer le premier ancêtre de l’ordinateur et découvrir la clé de décryptage. Un acte qui doit rester secret. Alors quand un policier vient l’interroger quelques années plus tard, il dévoile son véritable passé. Sa plainte pour vol qu’il avait déposé prend des proportions disproportionnées. On l’accuse d’«indécence manifeste et de perversion sexuelle» qui est le terme pour dénoncer l’homosexualité qui est un crime. Il plaide coupable car il n’a pas honte de son identité. Le jugement sera terrible car il va devoir subir une castration chimique à base d’oestrogènes pendant un an qui modifie sa voix, le fait grossir, lui fait pousser les seins, le déprime… Et surtout, son monde va s’écrouler car il va perdre son emploi d’enseignant et ne pourra plus faire de recherche pour l’état. Pour mettre fin à son calvaire, il rendra un dernier hommage à son dessin animé préféré : « Blanche Neige et le sept nains ».
Une histoire incroyablement bien racontée. Benoit Solès interprète de façon magistrale le personnage d’Alan Turing. Il trouve le bon équilibre entre la fragilité, la douceur et la folie d’un scientifique. On s’attache à lui. On se sent emporté par de nombreuses émotions face à l’injustice qu’il va subir. Une prestation qui mériterait une nomination aux Molière. Son collègue, Amaury de Crayencour, qui joue les autres personnages n’est pas en reste. Il brille par la justesse de son ton et de son comportement. Un duo d’une grande complicité qui permet de donner de l’intensité au récit. La mise en scène de Tristan Petitgirard et d’Anne Plantey est ingénieuse, fluide avec les différents espaces multifonctions. Un petit changement et le lieu devient autre facilitant ainsi les allers retours dans le temps. Sans oublier l’utilisation de l’écran numérique de façon astucieuse et esthétique qui s’adapte à toutes les situations. Même certains détails sont disposés ici et là avec une pomme, des extraits de « Blanche Neige et les sept nains » avec la sorcière empoisonnant la pomme et bien entendu le clin d’oeil à Apple. Le fondateur de la firme aurait choisi comme logo une pomme croquée en faisant référence à la mort d’Alan Turing qui aurait mis fin à sa vie en croquant une pomme pleine de cyanure. Une fin astucieusement choisie par son auteur interprète Benoit Solès car le mystère restera totale sur le suicide du génie mathématique car la pomme n’a pas été analysée et Apple dément le choix du logo par rapport à Alan Turing. Mais il serait dommage de passer à côté d’une telle histoire qui rend le mathématicien encore plus mystérieux.
Un spectacle qui nous emporte grâce aux très talentueuses prestations des deux comédiens et à la mise en scène d’une grande précision. Coup de coeur garantie.
Mais où voir le spectacle?
Théâtre Michel
38 rue des Mathurin
75009 Paris
Jusqu’au 31 août 2019 du mardi au samedi 21h – dimanche 16h