Dès notre arrivée dans la salle, une ambiance chaleureuse et réconfortante nous envahie. La scène dévoile un monde assez onirique et clinquant. Progressivement, l’émotion, à la fois brute et pudique, s’installe sans effet superflu et nous touche droit au cœur.

Ce spectacle nous plonge dans une réalité sociale rarement évoquée avec beaucoup de justesse, de folie et d’humour. Un conte initiatique médiéval afro-queer qui interroge les figures blanches, de l’homosexualité dans la communauté noire et l’identité noire. Le texte, à la fois tendre et percutant, aborde la discrimination, la solitude, le racisme et la survie avec une provocation maîtrisée. Les mots sont choisis avec soin, comme pour redonner dignité et humanité à ceux qu’on ne regarde pas vraiment et/ou que l’on juge. On sent la volonté des artistes de rendre visibles les invisibles. L’ancrage est dans notre monde avec ces fameuses applis de rencontre. Les dialogues résonnent et la beauté du langage se mêle à la rugosité de la vie quotidienne. On découvre une autre vision de l’école Henri IV. L’énergie d’Anthony Martine et Mérèndys Martine transforme chaque tableau en acte de résistance poétique. La pièce rappelle que le théâtre peut encore être un espace de parole libre, de dénonciation et un miroir des fractures contemporaines.

La mise en scène, exubérante et fluide, épouse le rythme des émotions ainsi que des rires. Tout sert admirablement le propos avec une exubérance plaisante. Les lumières dessinent des zones d’ombre et de chaleur, traduisant la frontière fragile entre désespoir et espoir. Chaque objet, chaque déplacement trouve son sens pour tous les moments. Un coup de coeur pour l’instant podcast avec ce tissus qui relie la fratrie. On parle de ces coups de coeur avec des recommandations culturels, du partage de souvenirs et de blessures. Un moment de sincérité touchante qui ose dénoncer tout en faisant rire avec des paillettes, du rose, des plumes… Surtout on est emporté par le moment de danse avec des bottes hautes à talon haut et une petite culotte rose, so queer et so wonderful. Leur engagement, profondément humain, donne à ce spectacle force et prise de conscience.

Une pièce réussit à transformer la dureté et l’injustice du réel en geste d’amour et de fête. Derrière la gravité, il y a la chaleur, l’humour discret, la tendresse et lien entre les artistes. On rit, on s’émeut, on se surprend à espérer. L’ensemble dégage une humanité précieuse, celle qui relie au-delà des mots et rappelle la puissance du théâtre quand il s’ancre dans le vrai.

Où voir le spectacle? 
Au théâtre 13 jusqu’au 11 octobre 2025

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