Une lumière crue, un corps en mouvement et des mots qui claquent comme une confession. Michaël Délis s’expose sans filtre, transformant sa vie intime en un laboratoire d’émotions, de réflexion et de lucidité. Le rire se mêle au trouble, la franchise désarme et le public, tour à tour amusé et ému, ne peut détacher son regard et son écoute.

Dans La fête du slip ou le pipo de la puissance, Michaël Délis plonge au cœur des addictions sexuelles, du rapport au désir et de la quête insatiable de plaisir. « J’ai un rapport très cordial avec mon pénis. » Ce n’est pas une confession impudique, mais un miroir tendu à toute une génération submergée par la consommation de l’image et le culte de la performance ainsi que de la virilité. À travers un texte percutant et magnifiquement rythmé, il interroge la virilité, le porno, la peur du vide et l’angoisse d’être normal. Chaque mot est jeté comme une déflagration, chaque silence devient une respiration nécessaire. Le ton oscille entre humour cru et réflexion poétique, mêlant l’intime et le social avec aisance. On passe du rire à l’inconfort, de la confession à la satire, avec un équilibre savamment dosé. Loin d’être obscène, ce récit devient une exploration des corps et des désirs, une manière de réconcilier le charnel et le sensible. « J’ai arrêté de baiser pour faire l’amour. » Le comédien assume tout, aussi bien le ridicule, la peur que la culpabilité. Ce qu’il raconte touche parce qu’il le fait sans artifice, dans une authenticité rare.

La mise en scène, d’une intelligence minimaliste, de Mickaël Délis et Papy de Trappes, sublime la parole sans jamais la détourner. Quelques néons qui changent de couleur suffisent à créer un univers vibrant, créant des espaces d’intimité. Ces variations lumineuses deviennent les pulsations du récit, les battements du cœur d’un homme en quête d’équilibre et de stabilité. La scène se transforme à vue, simplement, par la lumière, par le déplacement du comédien, par le rythme de ses mots. On sent la maîtrise du dispositif et la précision du jeu, qui donne au texte une dimension presque chorégraphique. D’ailleurs, il n’oubliera pas de remercier le régisseur qui actionne le changement de couleurs. Le corps raconte autant que la voix, l’espace se plie à son émotion. « C’est sur scène que je dois me mettre à poil. » Cette économie de moyens offre une liberté rare et donne au spectacle une puissance visuelle singulière. Ce choix de sobriété renforce la proximité avec les spectateurs. On retrouve certains personnages auxquelles on s’est déjà attaché dans les deux autres spectacles de la trilogie. On sourit aux phrases piquante de la mère, de l’ex à l’accent italien passionné de pâtisserie, du médecin qui fait un point scientifique ou de la morale du frangin, le jumeau metteur en scène, « tu es brillant et tu es chiant ».

C’est un moment de scène intense, à la fois cru, drôle et terriblement vivant. Un texte audacieux, une interprétation sans concession et une mise en scène d’une grande. Un spectacle qui libère la parole et réconcilie le rire avec la pudeur et la sexualité.

Où voir le spectacle? 
A la Scala jusqu’au 31 décembre 2025

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