Montaigne n’est plus un jeune homme. Il s’est retiré de la vie publique pour écrire et réfléchir sur le monde. Hervé Briaux lui prête sa voix le temps d’un spectacle.
Il s’empare des « Essais » de Montaigne pour les partager avec le grand public. Il propose une version très abrégée avec des éléments qui doivent faire écho avec sa vie. L’homme de 68 ans a lui aussi connu bien des aventures. Alors ces paroles raisonnent avec plus de vraisemblance et de fermeté. « Le monde n’est qu’une école de recherche ». Il parle calmement et pose chaque mot avec une grande maîtrise aussi bien de sa voix que du rythme. Son approche à l’aspect simple, l’a rend très accessible. Il donne une forme de contemporalité à ces textes rédigés entre 1571 et 1580.
Tout commence dans la pénombre, illuminée par quelques étoiles. L’acteur est couché torse nu sur un matelas. Il se lève aux aurores et ce depuis si longtemps. Il partage son expérience et son analyse aussi bien sur les croyances, les animaux, la nature, les femmes et bien entendu la mort. Les contradictions ne manquent jamais. Le dissensus cognitif ne date pas d’aujourd’hui. Il faut prôner la tolérance mais surtout pour sa communauté. Pour les autres, on les juge, on les méprisse voir même on les tue. Comment bien déterminée la bonne morale ou éthique? On ne peut guère lutter contre la bêtise humaine.
« Je propose des idées informes et incertaines.
Non pour établir la vérité mais pour la chercher.
Nous sommes naturellement faits pour chercher la vérité.
La posséder appartient à une plus grande puissance
Le monde n’est qu’une école de recherche.
Et ce n’est pas à qui atteindra le but, mais à qui fera la plus belle course. »
Qu’importe l’âge des spectateurs, ces réflexions trouveront échos en chacun d’eux. La mise en scène de Chantal de la Coste reste très intimiste dans des petits espaces très peu chargés. Sobre à l’image de l’individu. Cela se combine à merveille au travail de Morgane Rousseau qui propose des couleurs chaudes et dans la semi obscurité. Rien de tel pour faire émerger des pensées philosophiques pleine d’allégresse dans une forme de pseudo confidence. Il parle de son choix de solitude dans son château, difficilement accessible, entouré de livres. Ces observations se subliment avec les compositions musicales de Nicolas Daussy. Elles sont si discrètes qu’on a l’impression de ne pas les entendre. Tout se combine à merveille pour le plus grand plaisir du public. Les 50 minutes passent très vite. Plusieurs spectateurs enthousiastes prévoient de revenir pour en profiter encore plus. Car oui, « vivre c’est combattre ».
Michel Eyquem se dévoile auprès d’un public curieux. Les textes du 16e siècle n’ont jamais été autant d’actualité qu’à travers le regard d’Hervé Briaux.
Où voir le spectacle?
Au Poche Montparnasse jusqu’au 20 juin 2024