Chacun pouvait profiter tranquillement de sa vie jusqu’à ce jour fatidique. Ce jour où ce petit chien a mordu le mollet d’un passant. La fin d’un monde pour l’ouverture d’un autre ?
Le nom de Marguerite Duras vous évoque une auteure de la vague du Nouveau Roman ou le titre « L’amant », « Hiroshima mon amour ». En rien vous n’assimileriez le nom de cette femme à une comédie absurde. Et pourtant, elle s’est illustrée avec un texte assez surprenant avec « Les eaux et forêts ». Michel Didym donne du volume à cet improbable histoire grâce à son ingénieuse mise en scène. Tout débute dans un décor qui se situe dans Montmartre. On se trouve dans un kiosque à l’aspect des plus ordinaires, donnant vue sur la Tour Eiffel, qui n’a pas de sortie, d’échappatoire réelle. Trois personnes se rencontrent. Une femme avec son chien, une femme seule et un homme qui se balade. Rien ne pouvait à l’origine réunir ces trois personnes, même pas l’hécatombe que subit Paris. Sauf ce petit chien. Sous des aspects de roquet quelconque se cache un croqueur de mollet. Il a bien aimé celui de monsieur apparemment. Un échange se met en place sur le fait que le chien à peut-être la rage, qu’il faut emmener l’homme à l’institut Pasteur, que les gens peuvent cacher bien des mystères ou qu’ils cultivent le sans intérêt…. Quel lien entre la mort et ces inconnus ?
Voilà les situations absurdes qui pointent le bout de leur nez sous prétexte canin. Comme quoi un chien peut-être le motif de nombreuses digressions et de non-sens absolus. Le banal, comme ce lieu qui n’est pas sans évoqué l’univers de Jacques Tati, se transfigure en un espace de partage improbable. Sous des aspects de gens simples, des blessures, des fissures s’affichent derrière ces sourires de façade. Quelques pas de danses et quelques chansons ne font pas disparaître la tristesse qui berce leur quotidien.
Brigitte Catillon, Catherine Matisse et Charlie Nelson incarnent avec sérieux leurs personnages assez singuliers. Jamais rien ne dérape et tout est tiré au cordeau. Ils ne peuvent se permettre aucune incartade car cela nuirait à l’harmonie de l’improbable. Leur comportement doit rester neutre pour donner sens à la sur-comédie comme le disait Marguerite Duras. Sans oublier le chien, Zigou ou Toto, qui se rappelle au spectateur comme point de départ à cette discussion. Il aboi, il bouge les oreilles… Il s’affirme, grâce à la manipulation, donnant l’impression que l’animal est vrai. Une illusion à la hauteur d’un récit qui saura en dérouter plus d’un. Doucement la lumière tombe sur la capitale et nos personnages vont devoir reprendre leur vie où elles étaient restées figées.
Un « gai désespoir » qui saura surprendre pour une comédie. Une expérience théâtrale que vous ne risquez pas d’oublier.
Où voir le spectacle?
Théâtre 71
3 place du 11 novembre
92240 Malakoff
du 3 au 7 décembre 2019