Direction le début du 20ème à la rencontre de deux génies Paul Langevin et Marie Curie. Le premier ancien élève de Pierre Curie qui travaille sur une théorie de la relativité et l’autre qui cherche à prouver l’existence du radium et de la radioactivité. Une rencontre professionnelle qui va s’ouvrir sur de nouvelles perspectives.

On pourrait croire à l’évocation du titre « Le paradoxe des jumeaux » que le spectacle va parler d’un sujet uniquement scientifique. En effet au congrès de Bologne en 1911, Paul Langevin présente une expérience de pensée sur la relativité qu’il a nommé le paradoxe des jumeaux ou le paradoxe des horloges. Des jumeaux viendraient à se séparer : un irait faire un aller-retour dans l’espace et l’autre resterait sur terre. Lequel des deux seraient alors le plus âgé? Chaque jumeau pense que c’est l’autre. La relativité restreinte ainsi proposée remettrait en doute la théorie de la relativité exposée par Einstein. Une histoire qui mériterait d’être mieux expliquée que par mon succinct résumé et qui pourrait être mis en scène. Mais ce n’est pas l’angle choisit par les auteurs, Jean-Louis Bauer et Élisabeth Bouchaud.

Au final, c’est un prétexte pour nous parler de Marie Curie, de sa soeur et de sa relation amoureuse avec Paul Langevin. Le théorème sera tout de même évoqué pendant quelques minutes permettant de justifier le titre du spectacle. Car l’histoire est ailleurs. On découvre une personnalité, passionnée par son métier de chercheuse. Elle veut prouver qu’une femme est capable de réussir en science en prouvant ces dires avec des expériences reproductibles. Pierre n’était pas la tête pensante du couple et elle une petite main. C’était deux êtres complémentaires dans leurs recherches. Le fait qu’elle reçoive un prix seule et comme femme n’est pas de goût de certains. Heureusement que beaucoup la soutiennent et savent que c’est une personne intelligente. Les auteurs ont choisi de montrer principalement que c’est une femme qui est soumise à l’amour. Elle refuse même de retourner dans son pays quand sa soeur vient lui rendre visite. Deux choses la retiennent dans sa nouvelle nation : ses recherches sur le radium et son aventure avec Paul Langevin, homme marié. La raison devient presque secondaire car elle est prête à renoncer à son prix par amour. Elle réagit de façon excessive à ces nouvelles émotions qui la touche suite à la perte de son homme idéal.

Photo : Pascal Gély

Est-ce alors ma perception d’une femme de tête, de courage et intrépide qui m’empêche d’apprécier ce spectacle? On me dit en sortant de la salle que la science ce n’est pas un sujet vendeur alors il faut mettre une histoire d’amour pour la rendre plus acceptable. Je pense que non. Est-ce que l’on dirait cela pour parler d’un homme scientifique? La quête du radium est incroyable à raconter surtout face à l’opiniâtreté de ces deux êtres. Il en a fallu des expérimentations, des efforts surhumains, des recherches de subvention pour trouver ces traces de radium dans son hangar de la rue Lhomond. J’aurais aimé découvrir ces démarches pour rencontrer cette femme et son ami Paul Langevin. Je reste persuadée que le théâtre est un outil idéal pour parler de science et le théâtre de la Reine Blanche nous l’a déjà prouvé avec l’excellent Galilée, le mécano par exemple. Et malgré l’énergie et le jeu toujours juste des comédiens, je trouve le temps long. Les ruptures se faisant avec les noirs coupent le peu d’élan dans le récit. Pourtant, la mise en scène de Bernadette Le Saché est ingénieuse avec l’aménagement de l’espace, le jeu avec les projections, le travail avec le fond sonore de Stéphanie Gibert. Tout comme le décor de Juliette Azémar qui nous plonge directement dans ce 19ème.

On y découvre une autre facette de la France, celle dont on parle assez peu malheureusement. L’extrême droite s’approprie la liaison de Marie Curie avec Paul Langevin. Une occasion pour montrer un nationalisme très répandu où Marie Curie n’est pas une femme scientifique. Elle est une polonaise, une juive, une personne qui prend le travail de brave français et est aussi une femme qui devrait plutôt resté à sa place, donc soumise à ces messieurs bien pensants. Une violence qui se fait entendre aux quolibets du peuple à son encontre qui résonne à l’oreille du public. Mais Marie ne flanche pas. Elle ne l’a pas fait face aux hommes scientifiques qui ont tout fait pour lui nuire. Une belle illustration d’un état d’esprit très français très bien illustré par la bande sonore et les comédiens.

© Pascal Gély

Un spectacle en demi-teinte où j’aurais apprécié en savoir plus sur la partie scientifique qui illustrerait en quoi Marie Curie est une chercheuse d’exception. L’amour est au final secondaire dans la quête du radium et du polonium qui auront sa peau.

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