Prenons un temps pour remonter en 1537, à Florence, où le cruel tyran Alexandre de Medecis prend du bon temps. Son comportement provoque une indignation dans les rues de la ville. Mais les bouleversements ne sont pas jusqu’au jour au Lorenzo décide d’agir. Un changement est-il possible?
C’est quoi Lorenzaccio d’Alfred de Musset?
Alfred de Musset a pris la plume en 1834 pour écrire une histoire qui fait écho à notre propre désenchantement. Doit-on encore lutter? Est-ce que cela à encore un sens? Lorsqu’un despote ou le politique sur un trône, ne fera t’il pas tout pour y rester et celui qui lui succédera, ne voudra t’il pas garder les même avantages? Ces interrogations font encore sens de nos jours donnant ainsi à Lorenzaccio un côté très contemporain. C’est peut-être pour cela que Catherine Marnas a décidé de faire une mise très actuelle.
Cette pièce est réputée injouable car elle se compose de 80 personnages et 36 décors. Mais ce n’est parce qu’il est annoncé autant de chose que cela doit forcément être réalisé. C’est 8 comédiens talentueux et fougueux qui vont incarner de nombreux personnages. La prise de risque ne va s’arrêter là. L’évocation de débauche, de bacchanales, d’abus sexuels ne sont pas des choses facile à évoquer oralement alors visuellement, c’est encore plus difficile. Un certain public risque d’être choqué. Par chance, personne n’est parti pendant la représentation comme quoi, ils avaient lu présentation de spectacle. Toutefois, cela a fait grincer quelques dents quand même.
Lorenzo indigné par la lâcheté de ceux qui protestent, il décide de prendre une décision qui pourrait changer ou non la société. Il va se rapprocher de ce dictateur festif, son cousin, Alexandre de Medecis. C’est en se parant des habits d’un dandy cruel qu’il va devenir une autre personne. Tout cela pour aboutir à un choix d’un acte en connaissance de cause pour prouver qu’il connaît la véritable nature humaine. Est-ce que la mort d’un despote peut ouvrir à la République? La réponse est sans appel.
« Je jette la nature humaine à pile ou face sur la tête d’Alexandre » – Lorenzo
Et qu’est-ce qu’on y voit sur scène?
Si comme moi, vous ne saviez pas à quoi vous attendre, vous saurez très vite où vous tombez. Lorrenzo (Jules Sagot) est déjà sur la scène et attend tranquillement que les spectateurs arrivent. Quand la régisseuse éteint la lumière de la salle, il enfile une perruque blonde et la musique électro démarre. Les autres comédiens arrivent déguisés et dansent en rythme. Nous sommes en pleine modernité de mise en scène.
C’est original de mélanger la modernité avec une partie d’époque avec les costumes. Et on voit la scène qui se coupe en deux, un côté plus étouffer où les fêtes se font dans un calme qui ne dérange pas les comédiens de l’autre côté de la scène. Ainsi on peut y voir des scènes secondaires, y entendre des témoignages de personnes invisibles. La séparation entre l’arrière-scène et l’avant-scène est habillée d’un rideau à lamelles plastiques qui filtre le son. Une scénographie très étudiée et très intéressante qui a su trouver sa place dans cette histoire bien sombre.
Les comédiens ne sont pas en reste pour la qualité de la représentation. Julien Duval est impressionnant dans son rôle de tyran qu’il incarne avec force et tranquillité. C’est une pièce maîtresse dans cette histoire où les tragédies se succèdent. On tue pour faire plaisir, pour gagner de l’argent, par passe-temps. L’horreur est au bout des paroles qui sont clamées avec calme et douceur. Mais la violence est là. On la voit dans ces actes où l’on empoisonne une jeune femme innocente, dans les pleurs d’un père, dans les petites rébellions très vite arrêté, dans les femmes violées, dans les paroles d’un prête corrompu… C’est à travers ces comédiens que ces mots résonnent et se font entendre.
Bénédicte Simon (La Marquise) nous fait raisonner les cris d’une femme qui rêve d’une république à un tyran qui ne veut que son corps pour distraction. Clémentine Couic touchante dans le rôle dans la jeune fille sensible qui va devoir périr. Zoé Gauchet sublime dans sa tenu moulante avec une cape. Francis Leplay muni d’un chapeau se transforme en perfide religieux prêt à tout pour arriver au pouvoir. Franck Manzoni très touchant en père aimant et en homme qui croit en des lendemains meilleurs. Jules Sagot qui devient Lorrenzo avec ces interrogations et ces doutes. Yacine Sif El Islam qui est ce jeune homme plein d’espoir et trop d’enthousiasme. Et Bénédicte Simon qui incarne des femmes laissées de côté. Un ensemble cohérent fort et qui se complète à merveille.
Lorenzaccio d’Alfred de Musset
Mise en scène : Catherine Marnas
Avec Clémentine Couic, Julien Duval, Zoé Gauchet,
Francis Leplay, Franck Manzoni, Jules Sagot, Yacine Sif El Islam, Bénédicte Simon
Du 26 septembre au 15 octobre 2017
Du mardi au samedi à 20h et le dimanche à 16h.
Théâtre de l’Aquarium – Cartoucherie de Vincennes
« Le mal existe, non pas sans le bien, comme l’ombre existe, mais non sans la lumière. » – Lorenzo
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