RETOUR A REIMS AFFICHELa Maison des Métallos a permis la mise en scène de l’essai autobiographique de Didier Eribon nommé Retour à Reims, sa ville natale. Ainsi va nous être raconté son histoire par rapport à son identité sociale et sexuelle. Une histoire qui résonne beaucoup, pour preuve le spectacle à presque jouer toutes les dates, salle comble.

Après le décès de son père, Didier Eribon, décide de retourner à Reims pour revoir sa mère. En revenant, il se rappelle les raisons de son départ pour avoir une vie différente de celle de ces parents. Issue d’une famille ouvrière, d’abord adhérant au parti communiste puis au front national. Il a voulu être différent puisque de toute façon, il était déjà différent entre autre par son homosexualité assez mal accepté par sa propre famille. Pour ces 18 ans, il partit du logement familial pour se faire une autre vie. Mais fuyait-il vraiment sa famille ? Ne serait-ce pas plutôt une certaine honte sociale ? Malgré ces idées contre la reproduction des élites, il doit faire face à son rejet du statut social de sa famille.

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Laurent Hatat, dans un décor minimaliste, a décidé de mettre en scène Sylvie Debrun dans le rôle d’une mère fragile et effacé et Antoine Mathieu dans la peau d’un fils qui revient à la redécouverte de ces origines. Dans un dialogue qui se rapproche assez du monologue, car le comédien discute autant avec sa mère, qu’avec lui-même qu’avec le public pour souligner une certaine incommunicabilité. Il raconte et découvre sa famille à travers un carton de photos aussi bien celle de l’enfance ou du présent avec le cercle familiale auquel il n’appartient plus. Les échanges avec sa mère autour d’actes du quotidien, comme prendre un café ou le dîner, se font sans grand déballage d’émotions, sans ressentiment et sans colère. Des mots avec des échanges factuels pour rendre compte d’un état de fait.

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Une pièce qui pousse à s’interroger sur le déterminisme social et sur ces choix également. En quittant ce cocon ouvrier, fatigué par un travail arasant avec des idées devenues racistes (parti communiste au FN), une femme qui doit entretenir le foyer tout en s’occupant des repas, un père qui va s’enivrer au bar après le travail, les scènes de disputes parfois violentes. Il voulait conquérir une liberté d’être et de penser. Maintenant, une pointe de déception pointe son nez car au final, il n’a pas pu dire adieu à son père.

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Une pièce qui m’a poussée à me poser de nombreuses questions et qui ne peut laisser personne insensible sur les questions de la logique de classe sociale, sur la perte des repères politiques, sur le délitement de la gauche, sur la montée en puissance du racisme, de la haine, de l’intolérance… Direct, honnête et franc, Antoine Mathieu utilise les mots de Didier Eribon pour saisir l’humain au plus profond de soi et l’emmener sur un autre chemin : celui de la réflexion.

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Ce qu’en dit la presse

Emmanuelle Bouchez, Télérama, 26 juillet 2014 : Du livre émouvant écrit en 2009 par le sociologue et philosophe Didier Eribon, le metteur en scène Laurent Hatat a tiré un spectacle sensible et intelligent. Il y navigue entre deux pôles : le difficile retour vers « la misère ouvrière » d’un homme qui l’a fuie à l’âge de 20 ans pour construire son existence et vivre une orientation sexuelle différente, et l’analyse brillante et minutieuse des pesanteurs de l’appartenance sociale. Bouleversant d’entendre le fils dire à quel point il s’est toujours vécu comme « illégitime » partout, et de le voir réaliser le sacrifice de sa mère, retournée à l’usine pour lui permettre d’étudier. La relation à l’école est bien le nœud cruel de ce Retour à Reims. Le retour sur soi d’un philosophe qui jusque-là avait préféré réfléchir à la « honte sexuelle » plutôt qu’à la « honte sociale ». Ce que le théâtre incarne ici avec force et simplicité.

Sandrine Blanchard, Le Monde, 26 juillet 2014 : Laurent Hatat réussit la gageure de transformer l’introspection de l’écrivain sur ses origines sociales en face-à-face poignant entre un fils d’ouvrier qui fui avec rage son milieu et sa mère qui, trente ans après son départ, tente de le comprendre. […] Il n’y a pas de pathos dans Retour à Reims, mais une vérité qui doit beaucoup à la formidable interprétation de Sylvie Debrun et Antoine Mathieu, sociologique et politique. […] Pour autant, le spectacle ne verse jamais dans la leçon politique manichéenne, se refusant à nier la gravité de ce qui se trame à l’école et dans les urnes. […] L’adaptation de Retour à Reims ne peut laisser personne indifférent.

 

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