Le Théâtre 13 accueille de nouveau une création parlant d’un sujet sensible mais brillamment écrit, mis en scène et jouer. La carte du temps est un ensemble de trois cris de rage et à la vie. Etes-vous prêt pour une aventure humaine au cœur du chaos ?
Naomi Wallace, auteure américaine a fait son entrée au répertoire de la Comédie Française en 2012. Son écriture aux apparences légères tape fort du point et n’hésite pas à dénoncer la société en général. Les personnages ordinaires sont en conflit entre leur humanité et leur rancœur. Des situations exceptionnelles vont les pousser à prendre des chemins qu’ils n’auraient peut-être jamais pris. Ici nos personnages vivent la guerre et la violence, qu’elle engendre. Trois pays, trois conflits, trois histoires et des récits d’hommes et de femmes bouleversants.
Le metteur en scène, Roland Timsit, propose une scénographie très originale qui sert parfaitement les histoires proposées. Sur le sol, les comédiens délimitent la scène avec du sable, belle référence au Moyen-Orient. Autour quelques sièges où pourront s’asseoir comédiens et public. J’ai eu la chance d’être assise au bord de scène et l’impression d’être au cœur de l’histoire est plus prégnante. Quelle bonne idée. La limite change au fur et à mesure des histoires pour disparaître totalement au dernier moment. D’ailleurs, un certain chaos envahit toute la scène, à la limite de l’espace public. Se trouve aussi derrière ce carré de sable une grande toile blanche qui permet de faire de jeux d’ombres très bien insérés dans l’histoire.
Ici pas de décors inutiles, ni de costumes tape à l’œil. Les trois portraits qui nous sont offerts parlent d’hommes et de femmes ordinaires qui souffrent. Ici, la question de la religion, de l’appartenance politique et même la nationalité n’a pas d’importance. Les gens deviennent égaux devant la perte qu’elle soit de son fils, de son mari, de ses amis, d’une maison, de la vie…
Le premier portrait, Entre ce souffle et toi, met en scène une jeune infirmière israélienne, Tanya Langer (Lisa Spatazza) et un père palestinien, Mourid (Roland Timsit). Il a perdu son fils mais pas totalement car ces poumons ont été transplanté dans cette jeune femme. Il est persuadé qu’un lien existe entre eux via son corps. Une rencontre étrange qui va être ponctuée par le balayeur (Abder Ouldhaddi).
Deuxième portrait, Un état d’innocence, se déroule dans le zoo de Rafah détruit par Tsahal. Oum Hisham Qishta (Afida Tahri), une mère palestinienne, vient dans ce zoo pour accomplir un acte difficile. Elle a décidé de rendre à la mère d’un soldat israélien, Yuval (Oscar Copp) gardien du zoo, « quelque chose qui lui appartient » : trois minutes. Les 3 minutes où elle l’a tenu dans ses bras avant qu’il meurt comme devrait le faire toute mère. Un personnage secondaire, un architecte (Roland Timsit) ponctue ce rendez-vous en parlant de la reconstruction et du passé.
Troisième portrait, Un monde qui s’efface, se passe à Bagdad, après la deuxième guerre du Golfe, en mettant en scène un jeune Irakien (Abder Ouldhaddi). Un jeune homme fantasque et très touchant nous raconte un évènement qui a tout changé dans sa vie. C’est avec passion et fougue qu’il nous parle, en prenant à partie le public, d’oiseaux pour repousser ses souvenirs qui au final le submerge. L’horreur de la guerre lui ont fait perdre son meilleur ami dans d’horrible condition tout comme sa grand-mère malade.
J’ai été très touchée par l’interprétation pleine d’émotion d’Abder Ouldhaddi dans ce dernier portrait où il a donné toute sa sensibilité et son dynamisme. Ce qui m’a véritablement touché. Tout comme, celle du metteur en scène et acteur, Roland Timsit, très présent dans les deux premières histoires où son regard et son langage corporel respirait l’authenticité. Alors quand le talent des comédiens sur scène côtoie une mise en scène très intelligente pour souligner un texte qui pousse à la réflexion dans tomber sans le pathos, je ne peux qu’applaudir des deux mains et saluer le fabuleux travail qui a été fait.
Encore bravo au Théâtre 13 pour proposer des spectacles d’une aussi belle qualité et bravo aux comédiens pour cette splendide performance. Naomi Wallace pousse un cri de rage et de douleur pour apprécier l’hymne à la vie qui en découle. Vous avez jusqu’au 7 juin pour découvrir cet évènement où vous ne verrez pas le temps passer. Le cœur serré et le sourire aux lèvres d’avoir vu quelque chose d’extraordinaire
Ce qu’en dit la presse
Télérama : Des brillants comédiens. Redevenir ouvert et conscient témoin du monde.
Le Figaro : David Ayala, un immense artiste.
Coup de coeur du Masque et la plume de Gilles Costaz – France Inter : Un texte très important (…) un spectacle qui va nous marquer.
La Provence : Un bouleversant état des lieux.
Politis : Un spectacle important, une douceur blessée.
L’Humanité : Un regard sensible et sensé sur le Moyen Orient.
Marianne : Bouleversant.
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