Le titre L’Assommoir de Zola, évoque une lecture laborieuse faîtes dans nos jeunes études. Alors, c’est avec un peu d’appréhension que l’on pourrait se rendre au théâtre et avec des interrogations sur comment les longues descriptions vont être présentées. Direction le Théâtre de l’Ouest Parisien pour aller à la rencontre de Gervaise Macquart.
Lorsqu’on arrive dans la salle, les six comédiens sont déjà présents et proposent un pré-spectacle. Ainsi tout en douceur on est mis dans l’ambiance totalement décalée dans lequel je va être plongé progressivement pendant les 2h10 de la représentation. Trois couples d’amis se réunissent pour fêter un mariage prochain. Les verres se remplissent de façon doucement et l’ambiance part dans une douce folie alcoolisée. Une belle occasion pour raconter la vie de Gervaise Macquart, cette honnête blanchisseuse du quartier de Goutte d’Or qui rêve d’un bon travail, d’avoir un chez soi et du pain sur la table. Mais voilà, elle a été abandonné avec ces deux enfants par son compagnon, Lantiez, parti avec une jeune fille.
Coupeau, zingiste, tombe sous le charme de Gervaise et souhaite se marier avec elle. Très vite, elle accepte surtout que ce monsieur ne boit pas. Quelques temps après, le ventre de Gervaise s’arrondit. Elle est enceinte de son troisième enfant : Nana. Mais voilà, Coupeau a un accident. Gervaise s’occupe de lui toutefois il dérive sur la pente de l’alcoolisme. Alors qu’elle se démène seul avec son entreprise, le désespoir va gentiment lui prendre la main pour la guider vers la déchéance la plus totale. Sa fille fugue. Elle devient alcoolique, couche avec son ex et son mari, perd son travail, son logement, la reconnaissance des gens du quartier et va même jusqu’à ce prostituer malgré son physique ingrat.
Les six comédiens incarnent les personnages des Rougon-Macquart à tour de rôle tout en racontant leur histoire. Les bouteilles se vident toujours en flux continu et les comédiens se lâchent dans leurs personnages. La qualité du jeux s’affiche ici avec grandeur car même les moments que j’ai cru d’impro ne l’était pas du tout. Les faux éclats de rire qui m’ont fait tant rire étaient jouer. J’étais bluffée. Car plus on avance dans la pièce, plus l’état d’ébriété des comédiens s’affiche. Plus le spectacle devient dur dans le texte et par conséquent cela se ressent sur scène, d’ailleurs, le texte de Zola devient plus prégnant.
Les six comédiens (Bess Davies, Mathieu Ehrhard, Baptiste Girard, Lucie Hannequin, Charlotte Krenz et Tom Linton) issus de l’Ecole supérieure du Théâtre National de Bordeaux suite à des échanges scolaires professionnels et à la rencontre de David Czesienski ont décidé de travailler ensemble à un projet théâtrale. Les élèves ont formé un collectif nommé OS’O. Le jeune metteur en scène berlinois, David Czesienski finissait la lecture de l’Assommoir d’Emile Zola et décida de leur proposer cette histoire. Il leur proposa un court texte avec 13 chapitres résumés. Tous sont tombés sous le charme de cette idée et ont tous collaborés à la création. Le travaille c’est fait entre texte écrit et improvisation pour donner un spectacle totalement surprenant. Tout l’espace est occupé alors que juste est présent un juxebox et une table. Les personnages sont entiers, vivants. Ils incarnent leurs personnages. Ils parlent, chantent, crient, dansent, s’embrassent, se frappent, pleurent, hurlent…
Dans un digne de la beat génération, l’humour au vitriol dérange autant qu’il fait rire. Le misérabilisme du prolétariat d’hier résonne doucement à nos oreilles de contemporain avec des similitudes étonnantes. On ne sort pas tout à fait indemne en sortant du théâtre. Le plus surprenant se trouve être cette drôle envie de lire Zola qui va construire très différement maintenant dans mon esprit. Merci cher collectif d’avoir une âme théâtrale à l’oeuvre massive et dense de Zola.
Ce qu’en dit la presse
Serge Latap – Sud Ouest : L’histoire de Zola est rondement menée. Une histoire pathétique dite sans pathos mais avec une belle empathie tragicomique (ou tellement tragique qu’il vaut mieux en rire, en boire), cruelle et inéluctable, comme le destin de Gervaise : griserie, ivresse, ébriété, excitation, débauche, gueule de bois, addiction, delirium tremens, noir.
Eric Demay – La Terasse : Faire passer sur scène la prose de Zola relevait assurément de la gageure. Défi relevé par David Csezienski, qui installa les anciens élèves de l’éstba dans le bar L’Assommoir (…).
Une atmosphère dionysiaque s’empare joyeusement de la brutalité du texte de Zola et place au cœur de son récit les thématiques de l’alcool, de l’amour et de la mort, mais surtout de l’importance de la solidarité en cette période de capitalisme florissant.
Il en passe une version par chez moi. Je devrais aller la voir, j’adore l’Assommoir…
C’est peut-être la même compagnie. Il faut tenter l’improbable par moment 🙂