Hedwig and the Angry Inch débarque à Paris et c’est une véritable surprise. Après des années de succès à Broadway, cette comédie musicale punk et rock débarque à la Scala. Entre humour trash, chansons détonantes et confessions touchantes, on assiste à une performance qui bouscule les codes standards et réveille nos cœurs queers.
Ce qui frappe immédiatement dans Hedwig and the Angry Inch, c’est la fusion des genres. Un monologue entrecoupé de chansons rock, punk, et tendres ballades, où Hedwig, figure transgressive et emblématique, livre son histoire avec intensité et sans compromis. L’ensemble est porté par une performance brute, entre humour trash et émotions poignantes. Née dans l’Allemagne de l’Est et marquée par une opération ratée laissant une « angry inch », cette femme trans cherche à s’affirmer, à exister, à hurler au monde sa présence. Sa rencontre avec Tommy Gnosis, futur star du rock, devient à la fois un amour intense, une blessure profonde et une obsession qui structure le récit.
Sur scène, Brice Hillairet incarne Hedwig avec une complexité touchante. Sa voix, traversée par la douleur, l’amour et la rage, est un véritable miroir de son personnage. À ses côtés, Anthéa Chauvière brille dans le rôle de Yitzhak, son mari, en drag king, offrant une performance vocale époustouflante. Ensemble, ils forment un duo étonnant, soutenus par les musiciens androgynes les Angry Inch, qui insufflent une énergie brute à l’ensemble. Le spectacle, qui flirte entre concert glam-rock, stand-up et théâtre, tient les spectateurs en haleine, effaçant les frontières habituelles du genre.
Hedwig and the Angry Inch aborde des thèmes universels, encore d’actualité : la quête de soi, la recherche de liberté, et la fluidité de genre. Dans un monde où les cases sont omniprésentes et souvent oppressantes, Hedwig dénonce les conventions et offre une vision radicale et transgressive de l’identité. Son histoire, une réinvention constante, est un cri de révolte contre un destin tracé, un appel à l’affirmation : punk is not dead.
La mise en scène de Dominique Guillo, qui connaît l’œuvre depuis 18 ans, est fidèle à l’esprit de cette comédie musicale hors du commun. Elle capte avec justesse l’essence de la marginalité et de la résilience, dans un décor simple mais efficace. Loin de la flamboyance de Broadway, la production française mise sur la subtilité et l’émotion. Les musiciens, dirigés par Raphaël Sanchez, plongent le public dans un tourbillon sonore, avec des guitares, des synthés et une batterie qui, à certains moments, auraient mérité d’être un peu plus fréquente au détriment du texte parfois trop long.
On rit, on sourit, mais il arrive que l’on se perde dans certaines longueurs. Hedwig, avec ses tenues extravagantes et son maquillage exubérant, bouscule les normes sociales et scéniques tout en secouant le public. Elle incarne à la fois la victime et la survivante, oscillant entre excentricité et gravité. Ses provocations, tout comme les blessures intimes qu’elle révèle, suscitent des rires autant que de la compassion. Le spectacle rappelle inévitablement le film éponyme de John Cameron Mitchell, sorti en 2001, ainsi que d’autres références cultes du genre, comme Priscilla, folle du désert et The Rocky Horror Show. En résumé, Hedwig and the Angry Inch se définit avant tout par son audace, et c’est cette audace qui en fait une expérience théâtrale unique.
Hedwig and the Angry Inch est un spectacle indispensable, où la transgression et l’émotion se mêlent à la perfection. Brice Hillairet et Anthéa Chauvière offrent des performances maîtrisées, portées par une énergie électrique. Ce show unique est une véritable fête de liberté et de rock.
Où voir le spectacle?
A la Scala jusqu’au 4 janvier 2025
Le Musical Rock aux 4 Tony Awards