Que peut-on voir dans l’entrebâillement d’une porte? Deux êtres qui se déchirent ou qui se courtisent. L’Amour pourra t’il les réconcilier?

Alfred de Musset créé sa pièce « Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée » en pleine Révolution, le 7 avril 1848 au théâtre-Français rebaptisé théâtre de la République. L’histoire est totalement en dehors de l’actualité alors que Paris est mis à feu et à sang. Peu de spectateurs viennent applaudir aux premières. La presse dénigre la pièce. Heureusement, l’auteur peut compter sur son ami Théophile Gauthier ce qui permettra tout de même de pouvoir jouer 52 fois la première année. Puis la courte pièce se donne de façon plus épisodique. Sa forme traditionnelle s’interprète avec deux paravents face au public visé avec les vicomtes, marquises, aristocrates… Au dénouement, le proverbe est cité ce qui éclaire l’action dramatique. Des proverbes qui représentent le monde qu’il fréquente tel les salons de la Nouvelle Athènes à Paris.

La compagnie le Homard Bleu décide de reprendre le texte et de le placer dans notre société moderne. On retrouve nos deux personnages #LeComte et #LaMarquise. Il vient la voir le jour où elle fait salon chez elle. Mais les conditions climatiques déplorables favorisent leurs échanges en toute confidentialité. Le ton semble badin et impromptu cependant tout est écrit avec précision, virtuose, sans laisser de place au hasard. Jeux de mots, formules implicites, double sens aiguisent un dialogue impitoyable où deux êtres n’osent pas s’avouer s’aimer. « Croyez-vous que ce soit bien divertissant de passer sa vie au milieu d’un déluge de fadaises et d’avoir du matin au soir les oreilles pleines de balivernes ». Un humour et une fantaisie que n’hésitent pas à exploiter les deux comédiens metteur(e)s en scène Anne-Sophie Liban et Matthias Fortune Droulers.

L’histoire se déroule dans un appartement avec tous le confort moderne. Même l’ordinateur portable répond lorsqu’on lui parle. Un choix cohérent qui s’adapte au public visé avec des personnes branché types bobos. Alors normal de trouver un téléphone portable, le tableau « La Naissance de Vénus » de Sandro Botticelli revisité, des ordinateurs dont l’un affiche un feu de cheminée en fond d’écran… De même pour les costumes où l’on observe une mini-jupe, des bonnets, un costume écossais… avec une préférence pour la couleur orange dans les détails (carotte, bonnet ou vernis à ongles). Même si le vocabulaire reste d’époque, il se fait toujours bien comprendre. Le trouble affectif se fait sentir pour les deux personnages. La Marquise pousse le Comte par delà des frontières de l’acceptable sociale. Un comportement pour tester la véracité des sentiments du coeur afin de compenser leur solitude et leur mal-être. La musique vous le prouvera. Car le spectacle débute avec « L’amour en solitaire » de Juliette Armanet pour passer « L’amour à la plage » de Niagara. Ainsi éclate une pulsion amoureuse, plus vraie donnant une ouverture à un mariage sincère et non de raison.

Stanislas Liban

Une adaptation audacieuse et moderne d’Alfred de Musset. Vous ne verrez plus jamais une porte entrouverte de la même façon maintenant.

Où voir le spectacle?
Lucernaire
53 rue Notre-dame-des-Champs
75006 Paris

jusqu’au 12 mai 2019


Tags:

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *